
L’Orchestre des Jeunes Gustav Mahler se devait d’être à l’honneur dans un festival Mahler européen. Fondé pour la saison 1986/87 à Vienne par Claudio Abbado, cet orchestre d’excellence recrute dans toute l’Europe ; des auditions sont menées tous les ans dans 25 grandes villes, avec au total 2500 candidats chaque année. Seuls les meilleurs sont retenus à l’issue des auditions, et bénéficient d’un parcours exceptionnel avec les plus grands chefs et les plus grands solistes. Seule condition en dehors de l’excellence : avoir moins de 26 ans. Ce qui donne un orchestre jeune et virtuose, enthousiaste, débordant d’une énergie contagieuse.
Hier c’était Daniele Gatti qui dirigeait cet ensemble, dans la 1ere symphonie de Mahler. Le choix de l’œuvre ne pouvait être plus judicieux pour un tel orchestre, qui a pu y déployer tout son talent, tant individuel que collectif. Et avec un nom comme celui-là, on est à domicile dans ces œuvres ! Daniele Gatti, quant à lui, dirige Mahler de longue date, et il a pu nous faire partager sa vision de cette symphonie en s’appuyant sur un orchestre particulièrement à l’écoute, très attentif et appliqué.
Le résultat est excellent. Bien sûr, on a pu entendre un certain nombre d’imperfections, surtout dans des pupitres sensibles comme les cors ou la petite harmonie. Mais l’énergie de l’ensemble a su les faire oublier, et on a suivi Daniele Gatti dans son exploration mahlérienne. Un premier mouvement extrêmement lent, comme une naissance progressive des sons de la nature, contrasté par moments par des tuttis au tempo nettement plus allant. C’est une vision très personnelle, on joue rarement ce début de symphonie dans ce tempo et avec des contrastes si prononcés. Un deuxième mouvement aux contrastes également très appuyés par le chef, dégageant beaucoup de joie et de bonne humeur, l’enthousiasme de l’orchestre emportant tout sur son passage ! La marche funèbre du troisième mouvement, démarrée par l’ensemble du pupitre des contrebasses (choix technique ?), n’avait de funèbre que le nom, prise à nouveau dans un tempo assez lent et dégageant autant de sérénité que d’ironie, avant le tempétueux Finale « Stürmisch bewegt ».Comme toujours dans les concerts de la 1ère symphonie, c’est ce mouvement que l’on attendait avec impatience ! L’orchestre ne nous a pas déçus : tempo allant, dynamique impressionnante, belle cohésion et niveau d’énergie à son paroxysme. Un mouvement endiablé et roboratif !
Au-delà de la vision de Daniele Gatti, très aboutie mais aussi très personnelle dans l’accentuation des contrastes et le choix des tempos, l’Orchestre des Jeunes Gustav Mahler a donné son meilleur dans cette magnifique symphonie, suscitant l’admiration d’un public conquis.
Hervé Le Guennec